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Les drames humains demandent respect et retenue, l’Hôpital mérite mieux que des querelles stériles
Paris, le 27 janvier 2016 – Les drames humains individuels, aussi douloureux et troublants soient-ils comme celui qui s’est produit dans un hôpital parisien récemment, ne doivent pas servir de prétexte pour alimenter des polémiques archaïques ou stériles. Utiliser ces situations pour chercher à opposer entre elles des catégories professionnelles serait aussi déplacé qu’irresponsable. Le respect que nous devons aux individus et aux communautés hospitalières demande que chacun sache raison garder.
L’ADH soutient depuis toujours une vision équilibrée et participative de la gouvernance hospitalière. Les directrices et directeurs qu’elle représente cultivent cette conception d’un management actif et respectueux, fondé sur une coopération étroite entre directeurs, responsables médicaux et soignants. Cette démarche est la seule qui vaille : on construit sur la confiance, pas sur la division. Mais cette démarche est aussi la plus exigeante : il est toujours plus facile de cultiver les querelles que de rechercher l’accord.
Qui pourrait croire que directeurs et médecins ne partagent pas des valeurs fortes et un sens aigu des responsabilités ? Personne n’agit seul à l’hôpital, chacun est dans un réseau de partenariat et d’interdépendance. Les dirigeants hospitaliers le savent, ce ne sont ni des autocrates, ni des «patrons» partisans d’un camp : dans l’immense majorité des cas ils sont en réalité les garants réels de l’intérêt général au milieu des avis particuliers.
Mais l’hôpital, lieu d’accueil de tous les espoirs et de toutes les souffrances humaines, lieu d’exigence, de compétence, de qualité, de pression médico-économique, de dialogue et de coopérations, n’échappe pas aux tensions humaines. Il est naturellement sujet aux pressions de notre époque. Il fait cohabiter des personnalités fortes, des individualités et des groupes souvent très impliqués dans leurs métiers.
C’est une des structures les plus complexes à piloter et à manager.
L’ADH tient dans ce cadre à exprimer son soutien aux dirigeants et responsables médicaux ainsi qu’à l’ensemble des équipes professionnelles de l’HEGP. Elle exprime son émotion devant le suicide d’un praticien sur son lieu de travail et s’associe à la douleur de sa famille et de ses proches. Mais elle dénonce fermement les tentatives d’amalgame et les propos publics excessifs de commentateurs qui manquent à leur devoir de réserve.
Les membres de l’Association des Directeurs d’Hôpital ont été profondément émus et choqués à l’annonce du suicide du Pr Jean-Louis Mégnien, le 17 décembre dernier à l’Hôpital européen George-Pompidou. Ce drame personnel interpelle la communauté hospitalière dans son ensemble et nécessite une analyse attentive des circonstances qui ont pu conduire un Homme à une aussi terrible décision. La mise en place d’une mission composée de personnalités extérieures était nécessaire, en complément des investigations confiées à la Justice ainsi qu’à la commission d’analyse des suicides. Comme tous les responsables hospitaliers, au premier rang desquels ceux de l’APHP et de l’HEGP, l’ADH attend de ces travaux que la lumière soit faite sur ce qu’il s’est passé et que des propositions d’actions concrètes puissent être formulées.
Les risques psycho-sociaux sont une réalité à l’Hôpital Public. Non seulement pour les personnels, mais aussi pour les femmes et les hommes qui y prennent des responsabilités, qu’il s’agisse de directeurs, de médecins, de cadres. L’hôpital est un milieu particulièrement complexe associant plus de 150 métiers différents. Des rivalités individuelles ou de groupes, des conflits et des tensions relationnelles peuvent naturellement y apparaître. Notre Association n’a jamais contesté qu’il existait parfois des situations locales problématiques, dont les facteurs sont toujours multiples. Mais l’ADH affirme que l’immense majorité des hôpitaux trouvent leur équilibre de fonctionnement par la coopération confiante entre direction, responsables médicaux et soignants, représentants des personnels et partenaires extérieurs. Nous soutenons la responsabilité médicale des praticiens ainsi que le rôle d’arbitre du chef d’établissement. Nous croyons à une gouvernance éclairée entre équipes qui cherchent à s’entendre et non à s’affronter.
Les hospitaliers sont animés par des valeurs fortes qui placent l’humain au cœur des considérations. Il y a bien un dénominateur commun au directeur, au médecin, au cadre soignant ou administratif et technique qui ont choisi de servir l’hôpital : donner du sens et du corps au principe de Service public hospitalier.
L’ADH refuse les grandes proclamations, les postures spectaculaires ou les conclusions hâtives tirées d’un drame humain dont personne ne peut s’approprier l’explication. Tant que la lumière n’aura pas été faite par la justice et par les commissions internes, toute tentation polémique nous parait manquer au simple respect que l’on doit à la victime et à ses proches, ainsi qu’au devoir de réserve auquel doit s’astreindre tout responsable hospitalier.
A ce titre, l’ADH regrette que quelques commentateurs aient choisi de diffuser à grand bruit des jugements aussi hâtifs que peu fondés, qui n’apportent rien à l’analyse de ce drame. Elle n’acceptera pas que l’on veuille jeter l’opprobre sur une équipe, sur des personnes, ou sur des professions quelles qu’elles soient. Elle rappelle que, si l’expression est un droit encadré par des règles professionnelles, la diffamation est un délit.
Les Directeurs d’Hôpital exercent par choix un métier complexe et exposé, au service des autres. Artisans autant que partisans d’une gouvernance équilibrée, ils animent ces relations au quotidien et gèrent très souvent des situations relationnelles complexes, notamment au sein des communautés médicales.
Or, cette nécessaire aptitude au management concerne tout autant les dirigeants que les responsables médicaux et soignants. On ne nomme plus les chefs de service et chefs de pôles comme autrefois, et l’ADH a toujours critiqué l’archaïsme des anciens mandats de «chef de service à vie ». Les procédures sont aujourd’hui plus partagées et plus transparentes. Et s’il est vrai que le management ne s’apprend pas sur les bancs des facultés de médecine, il est incontestable que les responsables médicaux sont de plus en plus nombreux à demander des formations au management, notamment lorsqu’ils accèdent à une chefferie de service ou de pôle.
L’ADH soutient ce mouvement. De la même façon qu’elle encourage vivement la mobilité des directeurs d’hôpital, la diversification des parcours, la diversité des profils, et la formation tout au long de la carrière, elle appelle aux mêmes évolutions dans les cursus médicaux : des formations systématiques lors de l’accès à des fonctions managériales, des mobilités si possible, et plus de diversité et de parité dans les désignations des responsables.
Le président et le bureau national de l’ADH